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« Le monde ne sera pas détruit par ceux qui font le mal, mais par ceux qui les regardent sans rien faire », a dit un sage.


samedi 4 juin 2016

6 juin : une date symbole

A propos d’un message posté sur facebook ce samedi 4 juin, petit rectificatif, qui ne change pas le fonds du récit : Bihome, natif de Kwirabiro, n'était pas du clan des Bahanza, mais d'un autre groupe proche de celui-ci, celui des Bajiji, auquel appartient aussi son frère Kivumbi, un dignitaire élevé (à titre de récompense posthume en faveur de la famille Bihome) au rang de dirigeant dans la région de ce célébrissime Buturirwa (le Kanerwa actuel). L'une des figures les plus connues pour avoit été repérées comme continuateur de Bihome s'appelle Emile Benyuje dit "Benyaguje". Celui-ci est député à l'issue des élections de septembre 1961 et devient par la suite représentant du Roi au Parlement. Il est exécuté sommairement en 1965 : Micombero et Simbananiye, l'un chef de l'Armée l'autre ministre de la Justice, refusent d'obtempérer aux injoctions du roi Mwambutsa voulant intervenir dans la crise de l’époque. Souffrant d'une atroce maladie à Genève, affaibli par son éloignement de la capitale Bujumbura, il disait qu'un membre clé du clan du Mutabazi Bihome ne pouvait pas disparaître comme vous le savez et sachez que le Roi Bangiricenge n’était pas le monstre que certaines langues mal informées décrivent, mais bien un monarque qui voulait user de son droit de rassembleur. Ou au pire son droit de grâce. Les deux chefs génocidaires (présumés) de notre histoire à l’époque ont refusé d’entendre sa parole.  


QUAND L’ASCENDANCE BIHOME PAIE LE TRIBUT D'UN COURAGE PATRIOTIQUE

On assiste alors à une chasse aux sorcières et plusieurs ressortissants du Buturirwa vont être assassinés ou emprisonnés. 

Plus tard, les jeunes du coin se verront collé le titre peu sympathique de "Bamenja", « twa Mujeri », des "Benyaguje", qui méritent la sanction suprême diront encore quelques mauvaises langues. Le Commandant Charles Karorero, un des tout premiers lauréats de l'Ecole militaire belge est, en 1969, enterré vivant dans ce contexte suite au putsch (préfabriqué?) qui emporte les Kanyaruguru et autres lumières intellectuelles victimes de l'intolérance ethnique du règne Micombero.  

En 1972, la génération montante du Buturirwa (tous clans confondus) héritière naturelle des figures de proue comme Benyuje et Karorero vont subir la purge... De sorte que votre serviteur que je suis maintenant devient cette année-là, à seulement 18 ans, le doyen d'âge des survivants instruits de mon niveau sur un rayon de plusieurs kilomètres.

En 1988, quand j'anime l'initiative "lettre ouverte" du 22 août contre les massacres dirigés par le gouvernement Buyoya, les services secrets veulent que je renie ma filiation à mon père Muhanza Gahugu. Ils me forcent de me nommer "fils de Benyuje" pour que le système hérité de Micombero se débarrasse de moi sans avoir à rendre des comptes.

J'ai refusé, refusé, refusé et gardé ma tête haute. J’ai proclamé bien sûr que Benyuje était très proche de ma famille, qu’il me chérissait comme son propre enfant, mais j’ai dit qu’il pouvait être mon père spirituel, un peu comme son grand père Bihome est l’ancêtre de tous les patriotes burundais, mais qu’il n’était pas mon parent biologique.

J'ai cher payé cette audace. Par la torture... Mais je dois témoigner que je dois mon salut suite à l'intervention d'un Major de la Gendarmerie de l'époque, le futur Colonel Dieudonné Nzeyimana (Ex-FAB, Dieu ait son âme !), assassiné dans des conditions très suspectes sous Buyoya II, quand notre Buturirwa était baptisé « zone rouge », cible de la répression féroce durant la période difficile de la guerre déclenchée par l’assassinat du Président Ndadaye. (Cf. Burundi, le non dit, Editions Remesha, Genève, 2001).

UN HEROS ENFIN CHANTE

Pendant plusieurs années, au début des années 2000 jusque récemment, nous les ressortissants du Buturirwa avons milité pour que le nom de Bihome sorte de l'ombre et soit élevé au rang de héros national.

Car nous avons su, avec certitude, pendant qu’on tentait d’effacer les traces monarchiques sous la 2ème République, à Ndago (Muramvya) par exemple, qui fut le site de la capitale royale sous Mwezi Gisabo (et qui accueille aujourd’hui l’entreprise Minolacs…, que certains parmi nos historiens proches des négationnistes des 50 dernières années, ont désiré enterré l'aura historique du personnage Bihome. Pourquoi précisément ? Parce qu'il était d'origine Hutu.

Il nous a fallu donc procéder à un travail de fourmi. Conférence après conférence, communication de bouche à oreille, parfois usage des médias électroniques, nous avons tenté quelques actions timides, qui trouvent finalement un terrain fertile grâce à l’intérêt que portent certaines hautes autorités à l’héritage historique commun.

Depuis 2013 ou 2014, notre voix a commencé à se faire entendre. Le mémorial du Traité de Kiganda (Traité datant du 6 juin 1903), qui trône aux portes de ce qui fut la résidence royale de Gisabo du temps de l’invasion meurtrière allemande de l’époque dans cette localité, est le résultat de cette démarche. Une association est même allée loin en décernant à la famille Bihome un prix à titre posthume.

UNE SPECIFICITE DE TAILLE

Depuis, nous sentons que le débat sur cette question fait son chemin, y compris maintenant parmi nos jeunes.

Une spécificité de taille : chez nous, la référence ethnique de nos origines reste une identité que nous ne voulons pas nier. Mais dire que nous tendons en même temps à la refuser à cause des aspects haines dues aux fabrications coloniales et aussi parce que nous désirons faire avancer la cause de la réconciliation nationale.

Nos enfants, au nom de l'intérêt patriotique national, apprennent à dire que naître hutu a été une incidence de l’histoire. Etre "Hutu ou Tutsi est le produit d’une culture dont se sont servi les traitres de notre Nation qui était une Nation Unitaire. Nous on est surtout des Bahanza, Bajiji, Banyakarama, Benengwe, etc... C'était cela l'identité de nos Bihome avant que le Burundi des Barundi unis se retrouvent divisés idiotement.

Le lundi, 6 juin 2016, dans deux jours, c’est donc une date anniversaire rempli de symboles. Merci de vous en rappeler.

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